mercredi, juin 14, 2006

Viens ici que je te taboote

Ce matin à Radio-Canada, j'écoutais une sexologue qui lançait un cri d'alerte à cause d'un nouveau groupe: Black Taboo.

Vous ne connaissez pas? C'est un groupe de musique hip hop qui ont des textes on ne peut plus édifiant. Des trucs comme:
God bless the topless
Écarte toi les fesses
Si t'es une bonne chienne
On va Slaker ta laisse
(tiré de God Bless the topless)

ou encore des classiques comme:
Une plotte c't'une plotte
Une queue ça pas yeux
Un coup d'langue dans slut
Pis ton string pogne en feu
(tiré de Une plotte s'tune plotte)


La sexologue décriait cette culture de banalisation du sexe qui s'immisce dans la chanson et qui risque d'influencer notre jeunesse et l'entraîner vers l'abîme. Selon elle ces textes sont de la propagande haineuse sexuelle et la chanson véhicule un message de sexualité dominée par un seul des deux sexes.

À date je ne suispas trop en désacord avec ce que dit la sexologue. Ce que je trouve étrange c'est cet aura de "ça débarque sur les rives vierges de l'océan culturel québécois". C'est à ce moment que je trouve que le discours devient légèrement alarmiste. La vulgarité, ça ne date pas d'hier au Québec.

Je peux même affirmer que la vulgarité a au moins 5 ans d'existence ici. À cette époque, j'était un jeunôt dans la vingtaine qui accompagnait sa nouvelle flamme et future femme dans un bar on ne peut plus Québécois: La boîte à Marius. Or dans cette boîte, les deux chansonniers ont entonné au grand plaisir de la foule une chanson intitulée "La p'tite grenouille", fleuron du répertoire chansonnier du Québec.

Je suis gaspésien et je n'ai jamais entendu cette chanson avant d'émigrer vers Québec où on me demandait si les gaspésiennes ont vraiment le sang chaud. Pire encore, je connais quelqu'un qui a fredonné cette chanson devant un gaspésienne noire avant de se rendre compte du lien entre son auditoire et la chanson.

C'est donc il y a au moins 5 ans qu'on peut retracer l'histoire de la chanson vulgaire au Québec. Si on compte Plume Latraverse, poête parmi les poêtes, on peut voir que son oeuvre remonte à 1971.

Et malgré l'influence néfaste de ces artistes, je pense que je n'ai pas trop mal tourné.

En fait, la sexologue et l'animateur ont fait un point selon moi important qui vient un peu modérer le propos. Ils ont parlé de la compréhension et de l'interprétation que les jeunes font de cette musique. C'est sûr qu'en tant qu'adulte on a un certain filtre qui se dévelloppe qui nous fait comprendre que ce n'est pas parce qu'un musicien le dit que c'est vrai ou c'est cool. Mais les adolescents et les plus jeunes n'ont pas nécessairement ce filtre.

Donc le meilleur moyen de protéger vos jeunes c'est de les éduquer. Ils écoutent de la musique horrible, assoyez-vous avec eux et faites une petite mise en contexte. Ne condamnez pas leurs choix musicaux, ça ne ferait que changer l'album en fruit défendu. Mais expliquer leur ce que vous trouvez répréhensible. Faites leur bénéficier de votre expérience et de votre filtre. Ne laissez pas Musique Plus et les disquaires éduquer vos enfants à votre place que diable!

Cet appel compte double quand on regarde un peu la méthode utilisée de tout temps pour vendre des disque: le scandale. Les Beatles on eu les cheveux longs, Elvis se tortillais, Kiss se maquillait comme des démons, Ozzy mangeait des chauves-souris, Mercyful Fate glorifiait Satan, Boy George s'habillait en femme et Marylin Manson a fait tous ces trucs en même temps. Dans cette quête continuelle du "shock value" l'aboutissement logique c'est Black Taboo. On pourrait même se demander lequel fait plus de tort à la condition féminine: une bande de mysogines comme Black Taboo ou une fille à moitié à poils qui se trémousse en chantant "I'm a slaaaaave for you" comme Britney Spears?

Ce ne sont pas Black Taboo qui sont à blâmer, ni même leur maison de disques. Ce sont les générations d'acheteurs de disques qui ont payé pour être choqués. Et je me compte dans ce nombre.

Le phénomène ne peut aller qu'en s'amplifiant probablement jusqu'au jour ou nous ferons face à l'inévitable: l'espcae alloué pour le scandal dans notre cerveau va déborder et comme dans n'importe quel système informatique le nombre trop grand sera interprété comme un nombre négatif. C'est alors que naîtrons les groupes de comptables qui séduiront notre jeunesse avec leurs chansons sur les vertues de réduire son réduire son ratio dette sur capital.

2 commentaires:

Anonyme a dit...

"l'influence néfaste de ces artistes" - C'est mal connaître l'oeuvre de Plume que d'affirmer des choses comme ça. Me viennent à l'esprit deux titres: Les Pauvres et Une chanson pour nous autres, mais il y a plusieurs autres chansons d'une grande profondeur dans ce répertoire. Des chansons qui font preuve d'une humanité rarement égalée.

Lucre a dit...

"Néfaste" ici était un brin sarcastique. En fait même si vous louangez Plume, mes parents avaient une toute autre opinion de celui-ci. Selon eux, Plume n'était empathiquement PAS une bonne influence.

sous ses airs de "gros mononcle saoul", plume fait preuve d'un raffinement sans égal.

Par contre, c'est difficile de défendre toute l'oeuvre de quelqu'un qui nous apprend que tout ce que ça prend pour faire un bon show c'est "pas de joints dans l'anus, pas de bière entre les dents" ou encore qui se sent "saoul comme une plotte qui se frotte sur un cadre de porte". Et que dire de la profondeur inénarable de Bobépine.

Il est facile de défendre Plume en ne prenant qu'une partie de son répertoire. Tout comme il est facile de l'attaquer en prenant une autre partie. Les gens vont voir dans son oeuvre ce qu'ils veulent bien voir.

Mais revenons à Black Taboo, pourquoi pas. Croyez-vous que leurs album serait plus acceptable s'il avait une ou deux chansons engagées dénonçant les maux de notre société au travers de leurs oeuvres plus misogyne? Parce que c'est ce que votre défense de Plume laisse paraître.